Dic - 21 - 2014

Nous avons applaudi chacune des pas en avant des compagnons de Lear dans leur lutte historique. Celle-ci, avec celle de Gestamp et sa « geste du pont roulant » est sans doute la plus importante de cette année dans le prolétariat industriel et son cœur, l’industrie automobile. Ce pas en avant nous remplit de joie, mais il ne faut pas confondre joie avec ivresse.

En juin, juillet et août on a eu un « conflit chaud » où a été décidé le sort du conflit, c’est-à-dire: que comme produit de l’action directe à l’intérieur et à l’extérieur de l’usine les licenciements massivement soient annulés, surtout ceux des plus de 60 activistes, et que les délégués restent dans leurs fonctions.

À la fin août la bureaucratie (avec le soutien de la société et le gouvernement) a réussi à revoquer les délégués et on est rentré, ainsi, à un autre moment du conflit. Une étape s’est terminée avec un bilan négatif et s’est ouverte une autre qui se poursuit jusqu’à aujourd’hui.

La lutte a continué à l’extérieur grâce à une vigoureuse campagne pour le rétablissement d’un important noyau de travailleurs licenciés, qui sont restés fermes pendant plus de trois mois.

Cette lutte de l’extérieur a eu ces derniers jours plusieurs nouveautés : la première, qu’un noyau de 14 camarades a très honnêtement annoncé qu’ils ne voyaient plus de perspectives dans la lutte pour le retour à l’usine et qu’ils continueront à lutter dans d’autres tranchées.

La deuxième, qu’un autre groupe de camarades (soutenus financièrement par une vaste campagne des groupes ayant des responsabilités directes dans le conflit), ont résisté à l’extérieur et ont obtenu une décision de justice favorable à leur réintégration.

Évidemment, c’est un développement positif dans cette longue lutte, mais qui doit être soumis à une interprétation correcte. La question est qu’une fois cette décision de justice obtenu, le PTS s’est lancé à annoncer une « grande victoire » qui n’est pas encore là.

Bien sûr, ce serait très important que les camarades soient réintégrés dans leurs emplois. La décision de juste est un pas en avant dans cette direction, mais pas encore la victoire qui annonce le PTS : c’est pourquoi les travailleurs licenciés qui sont restés dans le camp doivent d’abord rentrer dans l’usine et revenir à leurs postes.

C’est incroyable qu’un courant qui se dit « révolutionnaire » n’alerte pas des possibles pièges qui contienne cette décision de justice. Il est incroyable qu’après la révocation de la procédure de conciliation obligatoire en Gestamp[1], ils proclament le « triomphe », comme ça. Nous rappelons les camarades qu’on ne fait jamais confiance aux institutions de l’ennemi, même si cette institution s’appelle « justice ».

Il y a un autre problème plus général, de nature différente.

Au cours de décembre de 2013 et du début de 2014, presque 190 travailleurs ont accepté le départ volontaire, parmi eux, de très bons militants antibureaucratiques. A ceci il faut ajouter que plus de deux cents camarades ont été laissés dans la rue depuis que le conflit a débuté le 29 mai et au long du conflit, parmi les cinq délégués de la antibureaucratiques, 2 sont partis l’entreprise, 2 travaillent toujours et l’autre est en arrêt maladie. La réorganisation de l’usine sera longue, patiente et difficile mais indispensable ; Il y a eu des exemples importants qu’il ne fait pas abandonner. Mais l’usine est différente de celle qu’on avait au début de la lutte et inverser la situation sera un long travail.

Il est vrai qu’en cas d’obtenir le rétablissement effectif dans leurs postes des 28 collègues qui sont encore en lutte, ce serait un triomphe qui signifierait que l’usine n’est pas « terre brûlée » et des précédents de réintégration de camarades licenciés vendraient s’ajouter à ceux qui existent déjà. Par exemple, le précédent des camarades de FATE après la défaite de 2008 ou celui du camarade Maxi Cisneros à Firestone, réinstallé après une campagne intense de notre parti presque dans la solitude, après deux ans de lutte infatigable.

Mais de là à annoncer le « triomphe » dans la lutte dans son ensemble (comme le fait le PTS), il y a une grande distance. Parce que cette déclaration contienne une vérité à moitié (le triomphe qui signifierait le retour des 28 travailleurs licenciés), qui se transforme en un mensonge complet (dire que la lutte en tant que telle a triomphée).

Faire des amalgames et des manœuvres ne doit pas être la méthode dans les rangs des révolutionnaires. Ici, la manœuvre est très évidente : cacher le propre bilan de l’orientation donnée à la lutte.

En faisant campagne avec l’idée que « la seule lutte perdue est celle que l’on abandonne » (un aphorisme littéraire très mignon et vrai génériquement), le PTS cherche à cacher la vérité.

Plus précisément : que le PTS a refusé d’aller jusqu’au bout dans la lutte, rejetant la possibilité d’aller vers l’occupation de l’usine et en perdant pendant le conflit la direction de la base de l’usine !

Le PTS a passé ces derniers mois en essayant de faire cela : ne pas faire un bilan claire de la lutte, garder la définition que la lutte « n’est pas finie », fuir en avant par la voie judiciaire .

Et maintenant il prétend utiliser la décision de justice dire que le combat a été gagné. Mais la lutte n’a pas gagné dans l’ensemble et on n’a pas réussi encore à faire rentrer les camarades licenciés qui ne sont pas encore réintégrés. Cela va continuer d’exiger beaucoup d’efforts contre les manœuvres qu’inévitablement feront l’entreprise, le ministère du travail et la bureaucratie syndicale.

Si les camarades y réussissent ce seraient de très bonnes nouvelles : quelque chose de positif pour lequel il faut mettre tous les efforts afin qu’il devienne une réalité et, qui serait un précédent pour commencer à réorganiser l’usine après une défaite difficile au milieu de l’année.

Comité Exécutif du Nouveau MAS, 17 Décembre 2014


[1] Pendant la lutte de Gestamp, le Ministère de Travail avait prononcé une décision –obtenue grâce à l’héroïque résistance des travailleurs qui avaient occupé le pont roulant-, obligeant l’entreprise à réintégrer les travailleurs licenciés dans leurs emplois : quelques jours après, le Ministère de Travail lui-même a révoqué cette décision.

Comité Exécutif du Nouveau MAS, le 17 Décembre 2014

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