Oct - 8 - 2014

Depuis le 1 juillet dernier où ont eu lieu les premières manifestations, la ville- port de Hong Kong traverse une succession de manifestations, des occupations, de grèves générales et d’autres actes de protestation. Avec des hauts et des bas, cette série de mobilisations a déjà atteint les dimensions d’une grande rébellion, comme celles qui ont éclaté depuis 2011 dans de nombreux pays, parmi eux ceux du monde arabe.

La rébellion de Hong Kong est en elle-même importante, étant donné le rôle de cette  ville comme enclave commerciale et financière d’importance mondiale. Mais les conséquences de cette rébellion peuvent être beaucoup plus larges que les quelques milliers de kilomètres carrés qui occupé la ville-port. Puisque Hong Kong est une « Région Administrative Spéciale » de la Chine. Donc, la grande question est si sa rébellion va à s’étendre  au reste de cet immense pays.

La question politique qui a fait exploser cette révolte est, également, un thème mortel pour la dictature du Parti “Comuniste” chinois. C’est-à-dire, pour la bourgeoisie milliardere qui monopolise le pouvoir grâce à un parti que depuis de nombreuses décennies n’a  rien à voir avec le communisme ni le socialisme.

 « Un homme, une voix »… mais pas pour n’importe quel candidat

Honh Kong était jusqu’en 1997 une enclave coloniale du Royaume-Uni. L’impérialisme britannique avait conquis ce territoire en 1841/42. Enfin, en 1997, il a été contraint de le rendre, quand Hong Kong était déjà un prospère emporium commercial et financier, qui s’est développée rapidement grâce au big bang de la restauration capitaliste en Chine et également car il  a été l’une des capitales mondiales du néolibéralisme sauvage des années 90.

Pour effectuer le transfert du territoire à la Chine  sans problèmes majeurs avec sa population, Beijing a accepté de constituer une « Région Administrative Spéciale »,  où il y a un plus grand degré de libertés politiques, sociaux et culturels que dans la dictature bureaucratique du reste de la Chine.[[1]] Ceci a été fait sous le slogan « un pays, deux systèmes », qui a ouvert les portes au retour de l’île de Taïwan, séparée du continent après la fin de la guerre civile en 1949.

En vérité, même si à Hong Kong il y a plus de libertés et de droits démocratiques (par exemple, il n’existe pas l’étouffante  censure et interdiction de publications qui s’impose dans le reste de la Chine) les différences sont au fond  plutôt quantitatives que qualitatives. Un droit démocratique fondamental -le fait d’élire le gouvernement par le vote- n’existe pas, par exemple.

Ainsi, le chef de l’exécutif est « élu » par seulement 800 personnes «représentants des secteurs économiques et sociaux»… c’est-à-dire  par les milliardaires de Hong Kong et ses partenaires et amis, les milliardaires de Pékin. L’élection du pouvoir législative est une farce semblable, bien qu’un peu plus ouverte… La moitié est désignée  arbitrairement comme le pouvoir exécutif. Les autres sont votés populairement, ce  qui a permis l’élection de certains plus indépendants du PCC.

Cette situation avait encouragé depuis longtemps la demande que tant l’exécutif que le législatif soient élus selon le principe « un homme, une voix ». Cela était censé être en vigueur pour les élections prévues en 2017.

Pekín a accepté la demande de « un homme, une voix »… mais dans les élections de l’exécutif seulement trois candidats pourraient se présenter. Et les trois seront désignés par le PCC.

En bref: tout le monde peut voter… mais les candidats sont désignés par Pekín et  ses amis de Hong Kong. Pour cela, serait conformé un Comité de  1200 personnes (encore une fois les «représentants des secteurs économiques et sociales »!) qui décideraient  la liste.

Occupy Central apparaît

Aux protestations se sont incorporés  différents secteurs qui, en plus de cette demande démocratique générale, apportent également leurs propres problèmes. Dans la première ligne est la jeunesse étudiante, mais ensuite se joignent les secteurs du mouvement ouvrier et syndical, ce qui faciliterait le succès écrasant de la grève générale du lundi 29.

Dans cette vague, se renforce notamment  le mouvement Occupy  Central, qui émule largement Occupy Wall Street du 2011, qui a essayé d’occuper initialement le centre de la zone financière de New York. Occupy Central a également fixé l’objectif de paralyser le centre financier de Hong Kong.

Occupy Hong Kong avaient déjà acquis notoriété quelques mois avant quand, en août, il a organisé un référendum non officiel dans lequel environ 800.000 personnes ont soutenu l’adoption du suffrage universel, sans restrictions. Tant  le gouvernement de la ville que celui de Pékin n’ont pas reconnu ce référendum. Enfin, le 31 août, les autorités de Pékin ont ratifié leur décision de ne pas permettre une élection ouverte du prochain dirigeant de Hong Kong aux élections en 2017. Cela a renforcé les protestations.

La mobilisation croissante a eu comme réponse une répression brutale de l’exécutif de Hong Kong. Cependant, le gaz lacrymogène, les canons à eau, les bâtons et de nombreuses arrestations n’ont pas, jusqu’à présent, fait reculer le mouvement. Au contraire, après chaque attaque répressif, les foules qui occupent en permanence la place financière se sont multipliés. Et s’est propagé aussi le soutien parmi la population. Un large réseau  d’auto-organisation pour fournir de l’eau, de la nourriture, des soins médicaux et d’autres besoins des occupants a commencé à fonctionner.

Un élément important de ce changement est l’adhésion des secteurs du mouvement ouvrier et  syndical à la lutte. Ainsi, la grève générale du lundi 29 a compté avec l’adhésion des membres de la Confédération de Syndicats de Hong Kong (HKCTU). En ce qui concerne les mouvements, il faut souligner le débordement des organisations officielles, gérés par le PCC, comme la centrale d’étudiants et ses syndicats bureaucratiques.

Ce mouvement n’est pas né de rien. À Hong Kong, d’une part, il y a un précédent des luttes des travailleurs et des mouvements sociaux (par exemple, de défense des travailleurs immigrés). Le combat le plus important de l’année passée a été une dure grève des travailleurs du port, qui ont  fait face à Li Ka-shing, le patron le plus riche de Chine et d’Asie. D’autre part, la marge relativement plus large des libertés démocratiques, a permis le développement d’une avant-garde plus politisée que dans le reste de la Chine. À Hong Kong il y a donc des publications et des sites web qui reflètent les problèmes et les luttes ouvrières et  populaires dans tout le pays, comme la Chine Labour Net ou le China Labour Bulletin.

Mais cela ne signifie pas que la recomposition politique, la voie de la construction de nouveaux partis ouvrières socialistes révolutionnaires, soit une route pavée et facile. Comme dans le monde entier, ce renouveau progresse mais part d’un niveau très bas, combiné avec les illusions et les carences que nous avons vu dans les précédentes  rébellions…  et qu’il foudra surmonter…

Le nom du mouvement Occupy lui-mêmequi est aujourd’hui à la tête e »z mobilisations, résume ces limites. Son nom complet est: «Occupy Central avec paix et amour ».

Les perspectives et ses variantes

Ce qui se passe à Hong Kong, comme nous l’avons dit initialement, ouvre des nouvelles perspectives. Il s’agit, en effet, du mouvement politique  le plus important qui fait face à la bureaucratie millionnaire du PCC, depuis les protestations dans la place Tian’anmen, en 1989 à Pékin, qui ont été brutalement réprimées.

Mais, avec toute son importance économique et politique, Hong Kong n’est pas Pékin, capitale de la Chine. Pour cette raison, une des clés est si la contestation politique s’étendra au reste de la Chine. En cela,  un ensemble de facteurs pour et contre fonctionne. L’extraordinaire développement capitaliste en Chine a créé une nouvelle classe ouvrière qui montre des signes d’une combativité importante et croissante, face à des conditions d’exploitation atroces. En outre, il y a eu, dans les dernières années, des dizaines de milliers de « incidents »; c’est-à-dire, des débordements de colère populaire, beaucoup d’entre eux très violents.

Mais, en même temps, bien qu’il y ait un progrès dans la formation d’une large avant-garde syndicale, le niveau d’organisation et de conscience politiques de cette nouvelle classe ouvrière est en train de se développer mais en partant d’un niveau très bas.

Comment va se combiner tout cela par rapport à ce qui se passe à Hong Kong, c’est difficile à prédire. Jusqu’à présent, Pekín a imposé une censure plus stricte dans les médias. Et dans le peu d’information que le gouvernement fait circuler, il parle des « terroristes » qui opèrent dans Hong Kong. Cela indique qu’il a peur… mais en même temps réussi à faire que le reste de la Chine n’ait pas encore entendu ce qui se passe.

Mais, en revanche, le rideau de silence est insoutenable à long terme. Le gouvernement doit en finir dès que possible avec la rébellion de Hong Kong.

Si cela est « résolu » en octroyant le soufrage universel, où l’on puisse voter des candidats qui ne soient pas seulement ceux désignés par le PCC, cela établirait  un précédent mortel pour le régime.

Mais s’il  veut  le résoudre comme dans Tian’anmen, avec l’envoi de troupes et en faisant un massacre à Hong Kong, les conséquences pour un régime qui n’a pas aujourd’hui la légitimité d’il y a 25 ans pourraient être pas moins mortelles…

C’est pourquoi, il est explicable que Pékin ait été, jusqu’à présent, presque paralysé, parmi des options qui sont l’un pire que l’autre. Mais cette paralysie relative ne peut pas durer longtemps!

Solidarité mondiale avec les étudiants et les travailleurs de Hong Kong!

Quoi qu’il en soit, quelque chose est incontestable. La jeunesse et les travailleurs mobilisés à Hong Kong ont besoin de la plus grande solidarité internationale.

Si jusqu’à présent le régime des bureaucrates  milliardaires de Pekín n’a pas « résolu » le problème avec un bain de sang, ce n’est pas seulement par les problèmes internes que celui-ci lui provoquerait. La condamnation internationale  et la perte de légitimité d’un régime qui se montre dans le monde entier comme un promoteur de la paix, par opposition aux atrocités des impérialismes des Etats-Unis et de l’Occident, pèse aussi énormement.

Dans le monde entier, il est impératif de se mobiliser pour soutenir les jeunes, les travailleurs et le peuple de Hong Kong, qui demande le droit élémentaire de voter ses gouvernements.

Assez de répression à Hong Kong! Dehors les troupes de Pekín!  Soutenons les étudiants et les travailleurs que se mobilisent contre les bureaucrates du PCC à Hong Kong et dans toute la Chine!

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[1]. Un accord semblable a été effectué avec l’enclave portugaise voisine de Macao, qui est une autre « Région Administrative Spéciale » de Chine.

Par Claudio Testa, Socialisme ou Barbarie Nº 307, 02/10/2014

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