Dic - 1 - 2014

Demain, jeudi 20, un nouvel anniversaire du début, en 1910, de la révolution mexicaine, qui a été globalement un des événements le plus importants du siècle dernier, aura lieu. Le même jour, ont été convoqués de grandes manifestations dans le District Fédéral et dans d’autres villes pour les 43 élèves disparus et pour la démission du président Peña Nieto.

Bien sûr, le Mexique d’aujourd’hui est très différent à celui de 1910. Cependant, malgré ces grandes différences, il y a des points vitaux en commun. Premier et principal, la perte de légitimité et de consensus des institutions de l’État et surtout de la présidence. Deuxièmement, que cela ne s’accepte plus en silence et avec résignation: la situation qui découle de l’impunité est de plus en plus explosive, avec de larges couches de masses qui commencent à dire : ça suffit!

Tellement important est le scandale de la disparition des 43 étudiants, qu’il est très probable que les manifestations et les mobilisations –de plus en plus massives – augmentent pour se transformer en une rébellion en règle du peuple mexicain. Même, jusqu’à déclencher une vraie explosion révolutionnaire. Mais, quoi qu’il en soit, le Mexique est dans la plus grave crise politique et d’État qu’on ait vu depuis des décennies, ce qui n’est pas rien pour un pays d’une telle importance sur le continent.

Puisque les meurtres d’Iguala et la disparition subséquente des 43 normalistes, sont des actes odieux qui ont suscité l’indignation de larges secteurs des masses au Mexique et même au niveau international. Une majorité pense ou crie déjà haut et fort que les choses ne peuvent pas continuer ainsi! Le fait est que ces disparitions ne sont pas exceptionnelles: ils n’ont été que la goutte d’eau qui fait déborder le vase. C’est un vase rempli de sang de dizaines de milliers de mexicains et mexicaines.

Tout cela menace d’éclater sous le nez de ses responsables: le pouvoir exécutif d’abord ; les législateurs et les gouverneurs du PRI-PAN-PRD corrompus jusqu’à la moelle ; le pouvoir judiciaire qui s’achète et se vend comme eux ; les forces armées et les différentes forces de police, responsables de milliers de crimes : forces « d’État » qui sont généralement impossibles à différencier des « organisations privées » de criminels et de trafiquants de drogue… comme c’est le cas de Guerrero.

Ainsi, dans les protestations, en plus de la demande d’apparition avec vie des 43 de Ayotzinapa et, ensuite, la démission de Peña Nieto, il y avait un autre slogan important et significatif:  « L’Etat est responsable » En effet, par action ou par omission, l’état actuel du Mexique et, d’abord son chef d’Etat – le président Enrique Peña Nieto – est le responsable. Le Mexique semble être une sorte de « narco-Etat », où le pouvoir est réparti entre un ensemble de « caciques » territoriales de n’importe quel parti, tous unis par mille liens d’impunité qui répugnent la conscience populaire.

Dans l’une des maintes manœuvres du gouvernement de Peña Nieto pour effacer les traces de l’État dans le crime d’Iguala, son laquais, le procureur Murillo Karam, a laissé échapper une phrase qui est entré dans l’histoire: «J’en ai marre »

Mais il arrive que le peuple mexicain en a marre aussi… il en a marre de tous ces politiciens. Et il le dit en voix de plus en plus haute. Il en a marre de Peña Nieto! Il en a marre des atrocités, des meurtres et des disparitions qui sont monnaie courante depuis plus d’une décennie! Il en a marre de la grande corruption du trio PRI-PAN-PRD, qui également touche MORENA, la rupture « à gauche » du PRD!

Mais il en a marre aussi de la polarisation sociale, des riches de plus en plus riches et des travailleurs et des paysans et des masses populaires de plus en plus opprimées, plus pauvres et plus exploitées. Il en a marre des conséquences de la soumission à l’impérialisme yankee à travers du traité de libre-échange d’Amérique du Nord, qui a été l’un des principaux facteurs de la décomposition sociale qui a poussé à de nombreux mexicains à émigrer ou à être recrutés comme chair à canon des organisations criminelles appuyées par la bourgeoisie mexicaine et ses politiciens. Et les travailleurs et la classe ouvrière en a marre de l’exploitation, des bas salaires et des « syndicats » gérées par des bureaucrates millionnaires et les gangsters du PRI.

L’immense rejet à tout ça, aujourd’hui, est condensé dans un cri: Dehors Peña Nieto!… Ce serait un premier pas, mais d’une importance extraordinaire. Faire tomber l’actuel président va au-delà de sa misérable personne: cela pourrait ouvrir les portes à une remise en cause globale des institutions de l’État!

Qu’ils s’en aillent tous

S’il y a une chose que de plus en plus des mexicains commencent à comprendre, c’est que cet État, ses autorités, ses politiciens et fonctionnaires ne les représentent pas: ils les voient de plus en plus comme ce qu’ils sont : leurs ennemis.

Cette perte radicale de légitimité et de consensus s’exprime de mille manières. C’est comme un gaz inflammable qui s’accumule dans un bâtiment et maintenant une étincelle peut le faire exploser.

Bien sûr, cette délégitimation de l’État et ses institutions n’est pas passé inaperçue. Déjà sous des angles très différents sont proposées « des solutions ». Le grand pompier de la bourgeoisie mexicaine, Andrés Manuel López Obrador, qui dirige la MORENA (Mouvement de Régénération National), rupture du PRD, est sortie au premier plan en proposant des élections présidentielles anticipées. Raccourcir le mandat de Peña Nieto (qui expire en 2018) et faire les élections au milieu de 2015.

Cela ne signifie pas seulement que Peña Nieto ne partira pas toute de suite. Cela implique aussi quelque chose de pire: la démobilisation de l’actuelle protestation pour le canaliser vers une campagne électorale, qui, entre-temps, laissera les institutions de l’État tels qu’ils sont.

Dans le cadre de ce climat de questionnement et délégitimation de l’État, on entend aussi d’autres voix. Par une combinaison de nombreux facteurs, parmi eux les défaites sévères et la faiblesse du mouvement ouvrier, la faillite d’une grande partie de la gauche qui a été absorbée par le PRD lors de sa fondation en 1989, les éléments communautaires de la composition ethnolinguistique du pays, etc., au Mexique, il y a des fortes tendances autonomistes. Dans les années 90, avec le zapatisme, le Mexique a été la Mecque mondiale des courants autonomistes, qui étaient à la mode. Une partie de cette mode a été le slogan de « changer le monde sans prendre le pouvoir »…

Depuis lors, si quelque chose ont prouvé les expériences dans Mexique et dans le monde entier, c’est la fausseté de ce slogan et de la politique qu’il résume. Plutôt, les faits ont ratifié le contraire: « Hors du pouvoir, tout est illusion » (Lénine).

La  « anti-politique » de ces courants est vraiment le revers de la médaille du réformisme électoraliste de Lopez Obrador. C’est l’espoir que les « mouvements autonomes » imposeraient leurs revendications à la marge d’actuel État, sans le détruire luttant pour un autre État social et politiquement distinct.

Pour que le peuple travailleur mexicain ait la possibilité de clarifier ce qui s’est passé et punir les responsables, mais aussi pour qu’il puisse en finir avec le narco-État actuel et ses aberrations, afin qu’il puisse établir des institutions qui soient sous son pouvoir et contrôle, une issue révolutionnaire est nécessaire. Cela se résume aujourd’hui par imposer à travers la mobilisation révolutionnaire une Assemblée Constituante.

Que cette Constituante révolutionnaire décide sur tous les problèmes pour réorganiser le pays et ses institutions, au profit du peuple travailleur, et pas de la poignée de 50 milliardaires comme il se passe aujourd’hui. Qu’elle mette fin à la terreur de l’actuel narco-État, en dissolvant les corps répressives et en organisant l’armement de la classe ouvrière et les secteurs populaires. Qu’elle décide s’il faut donner le pétrole aux impérialistes, comme le fait Peña Nieto. S’il faut continuer avec la catastrophe du traité de libre-échange ou en finir avec celui-ci. Et ainsi, décider sur les enjeux capitaux que traverse la classe ouvrière aujourd’hui, le peuple et la jeunesse combattante du Mexique, refondant le pays sur de nouvelles bases.

 Solidarité internationale avec la lutte pour les 43 étudiants disparus

Enfin, un facteur d’énorme importance dans cette lutte est la solidarité internationale. Se mobiliser dans tous les pays, en dénonçant le gouvernement mexicain et en exigeant de l’apparition des 43 étudiants est essentiel pour renforcer la lutte au Mexique. Puisqu’en plus l’impérialisme, en premier lieu les Etats-Unis, a présenté à l’époque Peña Nieto comme le « sauveur du Mexique ».

« En sauvant le Mexique », déclarait la couverture du magazine Time du 24 février 2014. On y expliquait aussi « comment les réformes (néolibérales) de Peña Nieto changeaient cette nation entachée par le narco » (textuelle!). Dans le monde entier, la presse impérialiste a lancé le slogan du « Mexican Moment» la miraculeux « Moment Mexicain »… qui aurait débuté avec la vente du pétrole aux impérialistes, les privatisations, la destruction de l’éducation publique et d’autres mesures néolibérales.

Les étudiants de Ayotzinapa ont été réprimées, précisément parce qu’ils se sont mobilisés contre les plans de destruction de l’école publique. Promouvoir la solidarité avec eux, signifie en même temps mettre au pilori non seulement Peña Nieto mais aussi tous ceux qui l’ont impulsé et l’ont applaudi.

► Apparition avec vie des 43 normalistes!

► Dehors Peña Nieto!

► Par une Assemblée Constituante révolutionnaire que réorganise radicalement tout le pays!

► Que les syndicats se joignent et appellent à la grève générale à la classe ouvrière!

► Solidarité internationale avec la lutte des normalistes!

Déclaration du courant international Socialisme ou Barbarie, 19/11/2014

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