Abr - 24 - 2015

« Client arnaqué, technicien esclave »

Telefónica est une grande entreprise multinationale. Son monopole du service téléphonique en Espagne lorsqu’elle était une entreprise étatique lui a permis, au moment où elle a été privatisée par les gouvernement du PSOE et du PP, d’être en position de privilège pour dominer le marché des télécommunications en Espagne, Portugal et une grande partie de l’Amérique latine. Telefónica en Espagne como comptait autour de 75.000 travailleurs au moment de la Transition, aujourd’hui après des vagues successives de licenciements négociées avec CC.OO et UGT (Commissions Ouvrières et Union Générale des Travailleurs, syndicats majoritaires liés au PC et au PSOE respectivement), elle compte autour de 25.000 mil.

Comment est-il possible que Telefónica domine un secteur en expansion constante avec une telle réduction du personnel ? En utilisant le système des « entreprises collaboratrices », la sous-traitance, le outsourcing. Telefónica établit avec une série d’entreprises plus petites (ce qu’on appelle les « Contratas ») un contrat marchand à travers lequel elle leur donne des secteurs très importants du service téléphonique comme la réparation de pannes, les lignes de basse fréquence, la maintenance des répartiteurs. Le personnel des entreprises sous-traitantes n’a ni le salaire ni les conditions de travail des travailleurs de Telefonica.

Pour commencer Telefonica a une Convention Collective de travail propre tandis que les entreprises sous-traitantes utilisent la convention du métal qui fixe des salaires plus bas et des pires conditions de travail. En plus, le personnel des Contratas travaille à la tâche ou avec un système de points : chaque tâche (panne ou installation ou…) vaut un certain nombre de points et le salaire du travailleur dépend des points qu’il accumule. On est payé selon la production, détruisant donc la journée de travail, les pauses réglementaires, les jours feriés… En outre, le travailleur est obligé d’atteindre un minimum de points, et s’il ne les atteint pas il a une pénalité qui s’accumule de mois en mois, diminuant son salaire.

En outre les Contratas réduisent périodiquement leur personnel permanent, forçant leurs travailleurs à se « sous-traiter » eux-mêmes : devenir des travailleurs indépendants et des « entrepreneurs » auxquels on donne une certaine quantité de travail à condition qu’ils payent tout (véhicule, outils de travail, carburant, soins médicaux). Ces « travailleurs indépendants dépendants » ont tendance à avoir à leur tour des travailleurs sans contrat ou avec des contrats horaires qui leur permettent d’effectuer le travail accumulé parce que sinon l’entreprise qui externalise arrête de leur donner du travail. Des salaires de ces travailleurs qui sont au bout de la chaîne ne parlons même pas…

 « À la fin de la chaîne on trouve de plus en plus de travailleurs indépendants, auxquels les Contratas et les « Contratas des Contratas » louent des outils et véhicules et qui, ayant des contrats de 2 ou 4 heures par jour, sont obligés de travailler jusqu’à 12 ou 14 heures par jour tous les jours de la semaine afin de toucher entre 700-900 euros nets » , affirmait Teresa Rodríguez Celador, Secrétaire de l’organisation de l’AST (syndicat organisateur de la grève), à RTVE.es

Le contrat entre Telefonica et les entreprises sous-traitantes, est révisé tous les trois ans, habituellement on abaisse la valeur du point, on augmente les pénalisations en cas de nombre insuffisant de points… L’élément déclencheur de l’actuel conflit a été précisément que la multinationale Telefonica voulait baisser considérablement la valeur des points, et c’est pourquoi la grève vise à « abroger le contrat » que Telefónica a avec les sous-traitants et que celui-ci soit remplacé par un autre qui améliore les conditions de travail des employés parce que comme l’ont souligné certains travailleurs dans les médias ; « Nous avons passé 15 ans dans lequel chacune des révisions de contrats a abaissé les salaires et a flexibilisé les conditions de travail».

 « La révolution des échelles »

 « La marée bleue est là ». « Nous sommes méchants, nous pouvons être pire. Nous allons couper les communications ».

Des milliers et des milliers de pannes, des petits villages sans communications, des réseaux collapsés, des centres d’appels qui débordent de plaintes et des centaines de piquets d’uniformes bleus et des échelles qui bloquent les rues. Les conséquences de la grève illimitée que depuis le 7 avril mènent dans l’ensemble l’État espagnol plus de 20 000 techniciens et installateurs des Contratas qui travaillent pour Telefónica contre la tentative de modifier le contrat et faire baisser sur le salaire de leur travail pour approfondir la flexibilité auquel le secteur est déjà soumis. Une grève qui a été imposée par le bas et malgré les traitres corrompus de CCOO et UGT qui bien sûr n’ont ni appelé ni soutenu la grève. L’appel au niveau national s’est joint à la grève commencée à Madrid le 28 Mars à l’appel de l’Alternative Syndicale des Travailleurs (AST) qui par la suite a été rejoint par la CGT et Co.bas.

Une lutte exemplaire avec déjà depuis plus de quinze jours de manifestations, des piquets et d’actions permanentes. Se mobilisant vers les principales radios, chaînes de télévision et des délégations gouvernementales pour se faire entendre, organisant des caisses de grèves, établissant dans les quartiers différents points de propagande et agitation, faisant semblant d’être des centres de « Service après-vente » pour expliquer et étendre le conflit aux habitants, aux travailleurs et aux étudiants, bloquant les entrées aux centrales téléphoniques et en taguant les véhicules des briseurs de grève afin d’éviter qu’ils travaillent avec des phrases comme « Briseur de grève sans honte… et sans dignité. Cordialement : tes collègues », un nombre infini d’activités qui sont l’expression vivante d’une grève qui reflète le degré de ras-le-bol et de la combativité des travailleurs des Contratas qui, échelle dans la main, ont résisté et ont dit basta au monstre de Telefónica qui chaque les exploite de plus en plus et qu’en même temps continue de faire de bénéfices millionnaires.

À ce jour, la grève se poursuit. Et continue, aussi malgré le silence complice des médias et de « tous » les partis qui préfèrent ne pas en parle parce qu’ils sont en pleine campagne électorale. Avec le patronat et les syndicats bureaucratiques contre, avec la presse, le gouvernement et les partis qui tournent leur dos, la grève se poursuit. La lutte n’a pas fait la une des journaux papier ou à la télévision, dans aucun meeting électoral la situation de précarité des camarades n’a été dénoncée. Toutefois, la grève et la lutte continuent. Et elle continue pour plusieurs raisons, surtout pour la détermination, la fermeté et la combativité des camarades, mais aussi à cause de la justesse de leurs revendications et la solidarité et le soutien social qu’ils reçoivent.

Cela s’exprime lorsque les voitures et les motos qui doivent s’arrêter devant les piquets ou les piétons qui essaient de les contourner, adhérent et se solidarisent avec les grévistes ou les messages qui circulent dans les réseaux sociaux de plusieurs clients qui disent qu’ils sont depuis plusieurs jours sans service, mais qu’ils partagent les raisons de la lutte.

Lundi 20 avril, nous avons participé à la journée de manifestations et de piquets que la marée bleue a réalisé à Barcelone durant toute la journée et ce scénario c’est répété là. En plus du fait qu’il est émouvant de voir les camarades perchés sur leurs échelles, soutenus par une marée bleue qui crie que Telefónica les précarise et qui exige des améliorations dans leurs conditions de travail, nous avons été émous aussi de voir quelques travailleurs et travailleuses en CDI de Telefonica qui ont fait grève en solidarité avec leurs camarades externalisés et précaires et étaient présents dans les mobilisations et les piquets. Ainsi nous l’a dit Assumpció, travailleuse en CDI de Telefonica « bien sûr que je suis là en solidarité avec les camarades de contratas, parce que je travaille tous les jours avec eux et on a même les mêmes vêtements de travail. Bien sûr que je suis là, parce qu’ils travaillent 12 heures par 700 euros sans congés payés, tandis que Telefonica se remplit toujours les poches». Un important exemple qui fait effective et réelle la solidarité de classe.

Mais il est clair que maintenant que le conflit s’est installé par le mérite des travailleurs et des secteurs qui, dès le premier instant, les ont accompagnés et par l’acceptation sociale qu’il a, les médias et les opportunistes parlent y disent qu’ils soutiennent le conflit… bien sûr qu’ils le font de manière démagogique et seulement formellement.

Puisque, aux yeux de la majorité des espagnols Telefónica apparaît comme ce qu’elle est : un symbole des privatisations des gouvernements successifs du PSOE et du PP, une escroquerie qui a transformé l’entreprise publiques dans une caverne de brigands et en refuge des ex politiciens qui aujourd’hui occupent des postes de direction et touchent des salaires = millionnaires salaires comme Rato et Urdangarin qui appartiennent au Conseil d’administration.  Et de plus, tout en faisant des profits millionaires il précarise et a l’intention de le faire encore plus, aux travailleurs des Contratas. Contre cela, les échelles (outil de travail et symbole de la lutte) se sont revoltées.

Pour tout cela, plus que jamais il faut entourer du soutien et de solidarité les travailleurs des Contratas, pour que leur combat se renforce et se développe et donc sente un nouveau précédent dans la lutte contre les patrons exploiteurs et les syndicats et les gouvernements complices de cette situation. Socialisme ou Barbarie – Etat espagnol, se met à la disposition des compagnons en grève pour que celle-ci avance et triomphe. Force camarades !

Vive la grève des travailleurs des Contratas. Soutien total et solidarité avec leur lutte

A bas les contrats précaires

Disparition des faux « travailleurs indépendants » et CDI pour tous les travailleurs.

A travail égal, salaire égal. Une Convention unique pour tous et tous les travailleurs de télécommunications. Passage de tout le personnel des Contratas à Telefonica

 

Photos en solidarité des camarades du Courant International Socialisme ou Barbarie


Photos de la mobilisation des travailleurs à Barcelona


Par Carla Tog y Enrique Mosquera, depuis Barcelona pour Socialisme ou Barbarie, 23/04/15

Categoría: Français